L’engagement historique du SIA pour les droits électoraux des artistes.
Le Syndicat Indépendant des Artistes interprètes (SIA) s’est créé le 8 septembre 1984 et son premier combat syndical s’est inscrit dans la défense des intermittents du spectacle et, notamment, la revendication de leurs droits électoraux en entreprise.
La Société Française de Production (SFP), outil de production de l’audiovisuel public, était alors le plus grand employeur d’intermittents de France (environ dix mille professionnels non permanents par an). Pourtant, aucun de ces salariés intermittents qui, souvent, travaillaient régulièrement pour la SFP depuis plusieurs années, n’avaient accès au droit de vote pour les élections des délégués du personnel et des représentants au comité d’entreprise.
En effet, les critères électoraux prévus par le Code du travail avaient été pensés pour des salariés sous CDI ou CDD de longue durée et édictaient le fait de devoir être sous contrat au jour de l’établissement des listes électorales et au jour du scrutin.
Cette problématique était connue des syndicats confédérés (CGT, CFDT, FO, CFTC et CGC) mais aucun n’envisageait d’y chercher une solution, affirmant que leurs syndicats de personnels permanents représentaient fort bien aussi les droits des intermittents. De plus, ces syndicats craignaient que l’inscription de milliers de nouveaux électeurs ne chamboule les équilibres établis et, surtout, rende plus difficile l’atteinte du quorum électoral au premier tour de scrutin, ouvrant possiblement la porte à des candidatures « libres » au deuxième tour.
En 1985, avec l’aide précieuse du SRCT (Syndicat des Réalisateurs et Créateurs de Télévision), le SIA obtenait coup sur coup, par décision de justice, la reconnaissance de sa représentativité à la SFP puis l’établissement de critères particuliers d’électorat permettant enfin à de nombreux artistes et autres cachetiers de la SFP, non seulement de voter aux scrutins professionnels mais, pour certains d’entre eux, d’être élus dans l’entreprise.
Grâce à ces critères prenant en compte l’ancienneté de collaboration dans l’entreprise et un nombre minimum de cachets dans les douze derniers mois, près d’un millier d’intermittents (réalisateurs, artistes, cachetiers) devenaient donc électeurs et un certain nombre éligible.
Aux élections CE et DP de 1986, le SIA et le SRCT remportaient la victoire électorale dans les 3 collèges spécifiques mis en place pour les intermittents (Artistes / Réalisateurs / autres cachetiers).
Fort de ce succès, le SIA obtenait sa représentativité à Radio-France, alors deuxième plus important employeur d’intermittents., et également l’établissement de critères électoraux particuliers qui permettaient aux intermittents de voter aussi dans cette grande entreprise.
Confrontées au problème des « heures de délégations » à attribuer à des salariés intermittents, la direction de la SFP et de Radio-France acceptèrent chacune de négocier un accord particulier de « crédits d’heures » pour les élus non permanents.
Le vote des intermittents à la SFP a perduré pendant près de 20 ans (selon des critères qui ont évolué dans le temps), malgré la casse progressive de l’outil de production du service public voulue par les gouvernements successifs des années 80/90.
Ces conquêtes syndicales du droit de vote des intermittents furent possibles à la SFP et à Radio-France parce qu’elles en employaient des milliers par an, avec récurrence d’emploi sur plusieurs années. Jusqu’au début des années 2000, aucune autre situation favorable n’a permis de poursuivre valablement ce combat. Néanmoins, les lignes avaient bougé et plusieurs des conventions collectives du spectacle et de l’audiovisuel adopteront, au fil du temps, des critères électoraux pour les intermittents, critères souvent très timides ne permettant qu’à une poignée de salariés non permanents de voter, de temps en temp, dans certaines entreprises… et jamais de devenir éligibles !
Le SIA et le SRCT (devenu alors le SRCTA) ont été les deux premiers syndicats indépendants à rejoindre, dès 1993, la toute nouvelle UNSA (Union Nationale des Syndicats Autonomes). En 2003, la Fédération UNSA – Spectacle et Communication s’est constituée et a notamment obtenu, en mars 2005, sa représentativité dans le champ de la Convention collective des Entreprises artistiques et culturelles (EAC). Admise à la renégociation de cette Convention, la première revendication de l’UNSA visa l’amélioration des critères d’électorat des intermittents mais buta contre l’opposition des employeurs et la réticence des autres syndicats à modifier les critères établis.
Plus récemment, l’UNSA a difficilement obtenu une sensible amélioration du critère d’électorat prévu dans la nouvelle Convention collective des entreprises au service de la création et de l’événement mais, encore une fois, aucune prise en compte de l’ancienneté dans l’entreprise et, bien sûr, rien pour ce qui est de la possible éligibilité.
Cette rétrospective serait incomplète si n’était évoquée l’intervention de l’UNSA, en 2010, auprès M. Dominique DORD, député rapporteur de la loi sur les élections professionnelles dans les « très petites entreprises » (TPE). Le projet de loi initial – et tel que voté en première lecture au Sénat – prévoyait que ne seraient électeurs que les salariés répertoriés sous contrat dans une TPE le 31 décembre de l’année précédant le scrutin. Une telle disposition allait encore exclure du scrutin des dizaines de milliers d’intermittents (et pas uniquement du spectacle !) qui travaillent pour de petites structures mais justement pas le 31 décembre, qui est loin d’être une date anodine ! Le député rapporteur a parfaitement compris le problème mais, après discussion au sein de la commission parlementaire, n’a pu proposer mieux que d’élargir le critère à l’ensemble du mois de décembre (au lieu du seul 31). C’est ainsi que, depuis 2011, grâce à l’intervention de l’UNSA, les salariés de TPE ayant travaillé durant le mois de décembre précédant l’élection ont droit de vote au scrutin TPE, organisé tous les 4 ans.